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Taxe de séjour illégale

Délibération 2 « Taxe de séjour : modalités de collecte et fixation des taux pour 2023 » Conseil Municipal de Périgueux - 14 septembre 2022


Madame la Maire, Madame la Maire adjointe de quartier à la promotion touristique et au patrimoine, mes cher(e)s collègues et, au-delà, chers concitoyen(e)s,


Mon unique intervention portera sur deux points, le premier d’appréciation, le second un peu technique.


Le premier, celui de relever votre silence assourdissant mais très édifiant, jeudi dernier, devant l’assemblée de nos collègues élus de l’agglomération, là où j’avais souhaité, en effet, exprimer avec force, à la fois mon désarroi et mes craintes face à la décision que vous nous demandez d’entériner définitivement aujourd’hui.

Je ne reviendrai pas sur mes raisons largement développées de ne pas soutenir, pour ma part, tant sur la forme que le fond, votre choix de déconstruire une nécessaire politique touristique communautaire.

Votre mutisme, en revanche, face à nos collègues, en dit long sur vos intentions quant au devenir de notre vie communautaire. Cette assemblée représente à ce point si peu de choses à vos yeux que vous n’avez pas jugé, ni nécessaire, ni justifié, de prendre la parole ne serait-ce que pour expliquer votre retrait aux quarante-deux autres maires concernés par votre décision et fournir quelques gages de bonne volonté, pour un règlement apaisé du choix que vous leur imposez. Une seule raison m’apparait, à l’évidence, indubitable : le mépris pour l’intercommunalité.

C’est pourquoi j’ai souhaité faire entendre une voix pour notre commune, m’engageant auprès de nos collègues du Grand Périgueux à leur dire qu’il resterait quelques élu(e)s en veille dans la ville centre pour faire vivre la solidarité communautaire, tenter le maintien du lien et du dialogue et s’assurer, au cours du long processus de défusion, que les décisions prises par l’agglomération permettront aisément à vos successeurs une réversibilité de ce choix.

Ce premier point traité, je souhaite réitérer devant vous, mes cher(e)s collègues, mes craintes pour l’avenir de cette gestion trop incertaine. Vous aurez donc, Madame la Maire, tout loisir de m’étiqueter, une nouvelle fois, en « donneur de leçon », ce qui doit être votre qualificatif favori pour tous ceux qui vous font part de leur différence d’appréciation. Je vous ai affirmé, jeudi dernier, mon impression que la décision de reprise de la compétence n’était ni murie, ni mesurée. Je vous prie de croire sincèrement que j’aurais souhaité, alors, me tromper. Pourtant ce ne sera pas le cas. Ce n’est pas le cas aujourd’hui car le vote de cette délibération, que vous proposez n’a, tout simplement, pas lieu d’être.

Cette délibération relative à la perception et à la fixation du taux de la taxe de séjour par le futur office de tourisme communal, que vous souhaitez créer dans la délibération suivante, est infondée en droit.

Deux articles de lois font références pour régler les questions d’institution et de perception de taxes de séjour par un EPIC Communal. Il s’agit en l’occurrence de l’Article L5211-21 du Code Général des Collectivités et de l’Article L133-7 du code de tourisme, combinés.

Pour plus de clarté la Direction Générale des Collectivités Locales (DGCL) a publié une 7 -ème version, en juin 2021, du Guide Pratique de la Taxe de séjour, accessible aisément par tous, que je vous invite à relire, ou à lire si vous ne l’avez pas fait, qui stipule clairement les règles dans ses fiches « Question réponse ».

Le premier article de loi, sur la taxe de séjour, dispose que seules les communes qui avaient déjà établi leurs propres taxes et qui s’étaient opposées dans un délai de deux mois à l’institution de la taxe intercommunale peuvent maintenir une taxe de séjour sur leur périmètre. Or, dans notre cas, la délibération instituant la taxe intercommunale est intervenue en 2016 et les six communes qui avaient déjà instauré une taxe préalablement, et dont nous faisions partie, ne s’y sont pas opposées. Il apparait déjà que la commune de Périgueux ne peut instituer une taxe de séjour sur le territoire de la commune et par logique, encore moins d’en fixer les taux…

Le second article de loi, sur le reversement des taxes de séjour est applicable uniquement aux offices de tourisme institués en EPIC (ce que vous souhaitez effectivement réaliser dans la délibération suivante) et précise, en complément, que le produit de la taxe de séjour perçu sur le territoire de compétence de l’EPCI, en l’espèce, l’Agglomération, est obligatoirement reversé à l’EPIC communal et qu’en cas de coexistence de plusieurs EPIC de Tourisme sur le territoire d’un EPCI, chaque EPIC, donc chaque office communal, se verra reverser la part relevant de son propre périmètre…

En conclusion de la lecture combinée des dispositions légales, bien que la ville de Périgueux vienne de récupérer la compétence tourisme, elle ne peut fixer les taux et recevoir le produit de la taxe de séjour collectée sur son territoire. Elle ne s'est pas opposée valablement en 2016 à la taxe intercommunale.

L’Agglomération reste donc le seul collecteur, qui le transmet ensuite à OT du GP qui reversera la part communale à l'office de tourisme de la ville à la condition qu’il soit créé sous forme d’EPIC lui aussi. C’est d’une limpidité absolue.

Ceci est d’ailleurs confirmé par la DGCL qui indique que la possibilité offerte, en application de l’article 16 de la loi n° 2019-1461 du 27 décembre 2019, aux communes érigées en stations classées de tourisme ou en communes touristiques de conserver ou retrouver la compétence « promotion du tourisme, dont la création d'offices de tourisme » n'emporte pas de conséquences sur l'institution et la perception de la taxe de séjour.

Ironie supplémentaire, vous proposez un taux différent de celui de l’OT du GP, 10 centimes d’euros plus bas, qui n’aurait pas été valable car non harmonieux sur l’ensemble de notre territoire.

Et enfin, vous n’auriez pas pu, aujourd’hui 14 septembre, de toute façon, fixer les taux pour l’année 2023, car la délibération serait postérieure à la date butoir annuelle du 1 er juillet et ne pourrait donc pas s’appliquer le 01 janvier de l’année N+1.

Vous ne pouvez donc, Madame la Maire, valablement et dans le respect de la loi de la République, soumettre au vote de ce conseil, une délibération qui prévoit, comme c’est le cas ici, de percevoir directement par le biais d’un EPIC communal, une taxe de séjour dont vous décideriez, à plus forte raison, d’en fixer le taux.

Que d'irrégularités navrantes !

Je vous fais l’aveu de mon désappointement face à votre manque de vigilance, le vôtre et celui de votre adjointe au tourisme, dans l’étude de la faisabilité technique et juridique de vos décisions. Il conviendrait d’ailleurs, pour vous, quand l’heure viendra de corriger vos erreurs, d’en comprendre la genèse et de tirer tous les enseignements de votre mode de gouvernance.

La volonté du législateur en la matière a été entérinée par plusieurs jurisprudences depuis, dont un arrêt du Conseil d’état de 2021 (Conseil d'État, 3ème - 8ème chambres réunies, 26/01/2021, réf. 431187), qui confirme sans ambages, les points développés précédemment.


Aussi, à la lumière de ces arguments, non pas interprétatifs ou de posture, mais bien rationnels, objectifs et légaux je vous demande, cher(e)s collègues, d’agir en responsabilité et non en opportunité. Il n’est pas question de déterminer si l’objet de la délibération proposée est justifié et souhaitable, car justement cette délibération est sans objet puisqu’elle contrevient absolument aux termes de la loi en vigueur en la matière.

Vous devez sortir collectivement de l’ornière du conflit de loyauté dans lequel vous êtes enferrés. Je vous demande donc, non pas de prononcer un vote favorable ou défavorable mais de collectivement, refuser de prendre part au scrutin s’il est maintenu car vous y engagez votre responsabilité, ou à vous, Madame la Maire, de bien vouloir retirer cette délibération de l’ordre du jour de ce conseil. Le maintien, et pire, l’adoption de cette décision nous exposent, à minima, de façon certaine à une sanction immédiate de la part du contrôle de l’Etat, voire à une procédure devant la juridiction administrative compétente de la part de l’agglomération.

Entre nous, si vous aviez analysé sans précipitation ce dossier, cette délibération était superfétatoire et inutile dans votre processus de reprise de compétence…


Mais enfin, la vraie question soulevée par les élus de l’opposition et les citoyens, au-delà de cette complexité juridique, c’est : quel est le coût de cet entêtement pour le contribuable de Périgueux ?

Nous n’avons toujours pas, à ce jour, et c’est assez fréquent chez vous, alors que nous votons des délibérations engageantes, l’esquisse d’un budget prévisionnel pour éclairer nos décisions !


Je vous remercie de votre attention.

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